15 Juin 2020,
Les Junies , 15 Juin 2020
Bleiz Ha Ki (Loup et chien)
LOUP Y ES TU ?
La chose la plus omniprésente, la plus obsédante qui me poursuit depuis des années, c’est d’accepter ma part inconnue, ce que j’appelle aussi la part sauvage.
Elle a pour moi la forme d’un loup hirsute, au poil rêche. Je me sens divisée depuis toujours entre le chien et le loup.
Il y a des périodes de la vie où le loup affleure plus, où l’on devient sensible, perméable, sans l’avoir cherché, et peut-être à ce moment là, on s’en serait bien passé.
Je pense à la petite enfance, mais aussi à l’adolescence, puis plus tard à la ménopause.
La transformation de nos corps et de sa composition chimique permet peut-être cette perméabilité. Nous nous sentons vulnérables, dépassés par un déséquilibre émotionnel .
Entre les années 2009 et 2014 , des objets symboliques sont apparus dans ma peinture. Je les ai observés, mais pas réellement analysés à ce moment là.
Il y avait des échelles sans fin, des petites maisons qui montaient vers le ciel, un bestiaire particulier (loup, corbeau, poisson) des femmes aux têtes démesurément allongées vers l’arrière ;
Mon désordre émotionnel interne était à son paroxysme, divisé entre l’exaltation et des sentiments dépressifs.
Malgré tout, mon masque « chien » assumait son rôle de polir tout cela et de le rendre socialement compatible, du mieux possible.
Avec l’âge, j’ai appris à adoucir la frontière entre les deux , le chien, et le loup.. à faire d’avantage confiance à mes intuitions, mes ressentis.
Le lieu dans lequel je vis maintenant me permet de "raisonner plus juste " ...comme un instrument.
J’ai découvert les notions d’énergie interne (le Qi), d’intention, de perception, entre 2009 et 2014, en suivant des études de Médecine chinoise
La première fois que je suis tombée sur des écrits qui parlaient de tout cela, j’ai eu l’impression de trouver enfin l’évidence (Yang Jwing Ming « les racines du Chi Kung »)
NOTRE PART SAUVAGE ?
Selon une vision largement simplifiée, notre cerveau est fait de deux parties, la droite intuitive et la gauche cognitive
. En fait peu importe à quel petit bout de cerveau appartiennent les unes ou les autres des capacités, ce qui est clair en tous les cas, c'est que sont sur-évaluées celles purement cognitives au détriment des capacités intuitives.
L'humain « intelligent » suivant l'évaluation cognitive s'adapte parfaitement à un contexte balisé de réglementation, d'injonctions, d'interdictions, c'est un jeu pour lui, un circuit. Il y développe ses facultés d'adaptation.
Le raisonnement, la hiérarchie, l'ordre, parfaitement assimilés et acceptés comme les valeurs de référence en matière de raisonnement, sont alors un extraordinaire outil de maîtrise politique au niveau d'un pays, des activités humaines, de l'emploi, et même de la famille..
Il n'y a pas plus obéissant que celui qui se censure lui- même en regard des références posées comme règles : le cognitif chez l'humain balise son cheminement en suivant des modes d'emploi de la lettre a à la lettre z sans prendre de raccourcis, il s'en fait même un devoir et une satisfaction.
Voici un monde fait de cubes, qui doivent s’emboîter parfaitement, nous sommes des cubes, nos vies sont des cubes. Comme une vaste usine faite de chaînes de productions, tout est compté, calibré, à sa place, chaque robot peut ainsi œuvrer à produire.
La politique ressemble elle aussi à une chaîne de production, sans imagination ni… alternative.
Il peut exister une forme de confort à être un cube dans cette organisation, une vie de cube, sans aspérités.
Le nez dans le guidon, sans vision globale et appréciation plus philosophique, nous sommes arrivés à créer un monde absurde et qui se détruit lui-même.
Mais le « loup » s'agite, il griffe et mord à l'intérieur.
Ignorer tout ce qu'engendre nos capacités d'intuition et de connexion avec l'univers qui nous entoure c'est comme d'accepter de devenir aveugle et sourd, de ne plus toucher, de ne plus goûter, de ne plus sentir.
C'est une privation d'un sens incommensurable, et nous avons si bien travaillé que ce sens a perdu toute sa puissance.
Ce merveilleux sens habite notre inconscient.
L'INTELLIGENCE INTUITIVE
Elle est sans cesse en devenir, mutable, s’imprégnant de toute chose, de tout événement, nourrie de notre propre vécu, mais aussi de vies plus anciennes, de vécus plus larges, ce qu'on appelle aussi la mémoire collective.
C'est comme s'il existait parallèlement à notre monde visible: Un monde invisible, fait d'énergie, de connections, de savoirs, qui n'a pas de frontière spéciste , qui réunit tout ce qui est vivant.
Et nous sommes des éléments de ce monde, comme le sont les particules atomiques,
Rien ne se produit sans que chaque élément en soit impacté, et chaque élément lui-même inter-agit avec le reste.
Nous sommes tous, chacun, conscient d'une certaine façon de cette réalité insaisissable, sans vouloir y accorder de crédit, (et la société n'a surtout pas besoin d'individus qui n'obéissent pas aux règles)
Alors dans notre vie, tout est fait pour que l'on reste dépendants d'un certain ordre, de certaines logiques, et nous voici, chiens au bout de nos laisses, regardant vers la forêt.
Nous avons faim et soif de cette connexion.
ALORS ? COMMENT FAIRE ?
Nous nous vivons isolés comme des éléments imperméables alors que nous sommes tout l'inverse.
Tout nous traverse, mais comme dans une forêt qui nous paraît inhabitée, il faut être attentif pour percevoir .
Faire simplement le test de toucher l'autre, de poser sa main sur la peau de l'autre, et de devenir tout à fait attentif. Au début on ne sent rien, rien de particulier.
Mais en répétant cet exercice, et sans RIEN vouloir obtenir, on finit par ressentir tout ce qui gronde et ondoie et tourne , c'est comme des courants d'eau, ou d’électricité très ténue, il y a des mouvements, parfois harmonieux, parfois désordonnés.
Peut-être parviendra-t-on aussi à percevoir la respiration primaire, ou MRP, cette petite pulsation si infime.
Mais attention à ne pas attendre quelque chose, au risque de projeter nos désirs, de créer de la fiction et de rejoindre bientôt la cohorte d'apprentis gourous..
Être simplement aux aguets, à l’affût..
Et ne pas forcément vouloir en faire quelque chose.
Peut-être qu'il faudrait juste plus d'attention au monde, plus de silence, moins de volonté, pour laisser la place aux ressentis, à la perception.
Notre intuition fait partie de cette perception invisible.
Aux choses qui se présentent à nous, aux événements que nous vivons, nous avons des réactions internes, des acceptations, des refus.
Notre corps dit oui, ou non.
Mais la plupart du temps nous n'avons pas écouté sa réaction. Nous sommes dans la décision, l'échelonnement des tâches, la projection.
Nous ne voulons pas nous laisser entraver par des sensations infimes..
Ignorer cette intelligence, c'est tourner le dos à la nature qui est en nous, la même qui constitue notre monde, c'est ignorer de ce mettre au diapason de cette nature.
La nature n'est ni bonne ni mauvaise, elle est logique .
Une plante est faite pour pousser, aller vers le ciel, se projeter, développer sa capacité à produire des feuilles, des fleurs, des fruits.
Nous ne sommes pas différents, notre force de vie est la même, celle de pousser et d'engendrer.
Mais c'est comme si n'avions aucune confiance en cette logique , et qu'il faille remédier à tout grâce à tout ce que produit l'homme à force d' analyse et de supputations.
Accorder une place à notre inconscient, à notre intuition demande de lâcher ces barrières que nous longeons jour après jour. Cela fait peur, car cela demande aussi d'accorder une nouvelle confiance à notre monde sensoriel et émotionnel.
Les ressentis peuvent utiliser la voie des émotions pour se manifester et dans notre société, ça paraît si .. déplacé.
Toute cette matière vivante en nous, elle est étouffée la plupart du temps, assourdie, planquée.
Alors ? Alors je n'ai pas de recettes, mais il est certain que l'expression pure, dessiner, chanter, modeler de la terre, créer donc, sont autant de ressources pour rencontrer l'animal sensitif derrière la persona ...
Embrassez les arbres ! :)
Anne
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